Longtemps pour remplir mon frigo j’ai fait toutes mes courses dans les supermarchés. Et puis lasse de parcourir les allées bondées à la recherche de mon paquet de café, j’ai fui la foule et opté pour le service de drive. J’ai choisi la facilité. Une fois ma commande passée par internet, mes courses arrivaient directement dans le coffre de ma voiture. Gain de temps plus que d’argent, le plein d’emballages au lieu du plein de nutriments, voilà ce que m’offrait le drive. Il y a un an, j’ai tout arrêté et je me suis posée. J’ai réfléchi à ma façon de faire les courses. Comme beaucoup, refaire le stock de ses placards est pour moi une corvée. Si ma visite hebdomadaire au supermarché était une contrainte, pourquoi continuer?
La découverte du drive
Avant d’avoir recours au drive, j’ai fait mes courses armé de ma liste et de mon caddie. Slalomer entre les consommateurs et les chariots abandonnés au milieu des allées s’avère être un sport compliqué. Moi qui n’aime pas la foule et les linéaires gigantesques de produits, je me retrouvais au milieu de ce magasin à essayer d’attraper mon paquet de biscottes sans me faire marcher sur les pieds. Les courses ce n’est pas une partie de plaisir donc autant les faire à deux et le tout en dépensant un peu d’essence à chaque fois. Les supermarchés, temple de la consommation, sont bien souvent situés en périphérie des villes où le plus commode est d’utiliser sa voiture. D’après une étude de l’Insee, entre 1974 et 2010, le temps de trajet pour faire ses course a été multiplié par 3 (passant de 5 à 15 minutes) et plus de 60% des trajets se font en voiture. En revanche, en 1974, plus de 50% de la population (moins de 20% en 2010) faisait ses courses à pied avec un temps de parcours de 8 minutes (4 minutes en 2010). L’essor des hypermarchés en périphérie et le déclin du commerce en centre-ville sont les deux principales explications. Notre façon de faire ses courses a bien changé en 30 ans.
Finalement en 2013, j’ai succombé aux charmes du drive pensant faire des économies de temps et d’argent. Le principe est simple : vous passez votre commande par internet et deux heures après vous n’avez plus qu’à aller les chercher, en voiture de préférence. La première étape consiste à choisir vos produits et là votre œil est attiré par les promotions et autres semaines spéciales (Chandeleur, Pâques,…). Il est facile de se laisser tenter puisque vous n’avez pas de courses à porter. De plus, cela vous rapporte des points sur votre carte de fidélité. Votre liste de courses grimpe vite (en poids et en prix).
La deuxième étape est la réception des courses. Rien de plus simple, vous scannez votre carte de fidélité ou votre de bon commande et on vous amène vos courses que l’on pose gentiment dans votre coffre. Voilà en 5 minutes, vos courses sont faites. Enfin en théorie…
By Jim (http://www.flickr.com/photos/alphageek/121953651) [CC BY-SA 2.0]
Le drive en réalité
Je n’ai gagné ni temps ni argent à utiliser le drive. Bien souvent je me laissais tenter par les promotions et la tentation de gagner des points de fidélité et la facture montait vite. J’achetais aussi des produits que je n’aurais jamais pris en magasin. Je ne faisais pas toutes mes courses au drive car tous les produits que je prenais n’étaient pas disponible. Je faisais donc un tour au magasin avant de retirer ma commande. Ce détour imposait de poser la voiture sur le parking du supermarché puis la reprendre sur 500 mètres pour arriver au drive. Ce n’es pas synonyme de simplicité, de gain de temps ou de réduction de son impact écologique. Cette situation était absurde.
Pour le drive, il n’est pas question de faire des économies d’emballages. Enfin, et c’est ce qui m’a décidé, je pense, d’arrêter d’utiliser le drive, c’est l’attitude des gens à la réception des courses. Entre les gens qui sont impolis, qui ne décrochent pas de leurs smartphones ou qui considèrent l’employé qui vous apporte vos courses comme un domestique, je crois que j’ai tout vu. Dans le drive, vous n’avez pas à parcourir les rayons et peu de manutention, quelqu’un le fait à votre place et en plus c’est gratuit. Pourquoi ne pas en profiter pour acheter 15 packs d’eau?
L’envers du drive
A force de voir les employés courir entre chaque commande et décharger les caddies parfois bien remplis sans aucune aide, j’avais de plus en plus de mal à accepter ce principe. Je ne me voyais pas à leur place. Il y a donc un an j’ai décidé d’arrêter le drive.
Récemment j’ai lu le témoignage de Marie Gueguen, qui a travaillé dans un drive en Bretagne pour payer ces études. Son quotidien pendant 10 heures était limité à 3 actions « courir – piocher – scanner ». Pendant sa journée de travail, elle pouvait marcher jusqu’à 18 kms. Aux ordres d’une machine, son obsession est le temps. En lisant son témoignage, ce que j’avais peine à imaginer est pire dans la réalité. Tout est quantifié, disséqué pour que le service soit le plus productif possible. Les employés sont en permanence évalués. Chaque jour, il faut être le ou la meilleur – e : préparer le plus de commande possible en un minimum de temps. Et si vous n’êtes pas le meilleur, on considère que votre travail n’est pas bon? Ce que j’ai refusé de faire, je ne peux pas l’imposer aux autres.
Mes courses sans le drive
J’ai donc renoncé au drive et cela m’a permis de réfléchir à mon mode de consommation. J’essaie d’acheter des produits plus respectueux de l’environnement et de l’être humain (panier bio, marché …) en privilégiant les transport doux (marche, vélo). Une partie de mes courses est toujours faite au supermarché mais la taille du panier a bien diminué. Afin de limiter l’usage de la voiture, Mr Marmotte profite du trajet qu’il emprunte habituellement pour aller travailler pour faire nos courses. Enfin, il a opté pour un jour où il y a moins d’affluence. Nous ne passons pas moins de temps par semaine à faire nos courses (en moyenne les Français passent 2h41min par semaine à faire les leurs), nous passons simplement moins de temps dans les supermarchés.
Et vous, utilisez-vous le système du drive pour faire vos courses?
Pour aller plus loin :
Les damnés de l’hyper, Marie Gueguen, Philosophie magazine, juin 2015. Vous pouvez retrouvez un extrait ici
Le témoignage de Marie Gueguen dans l’émission Les femmes, toute une histoire, France Inter, à partir de 35min15
« Je n’avais plus le droit de parler avec mes collègues, ensuite ils m’ont supprimé ma pause pipi », Bastamag, 22 octobre 2015