[Découverte] Passager 120, le journal de la simplicité volontaire

Il y a quelques semaines, Mathias Jullien m’a proposé de découvrir Passager 120, un journal sur la simplicité volontaire. Je dois l’avouer, c’est un petit coup cœur tant sur le fond que sur la forme. J’ai apprécié l’objet (la mise en page, la typographie) mais aussi l’écriture. De plus, l’idée de rechercher un mode de distribution minimisant l’impact sur l’environnement m’a beaucoup séduite. Après cette lecture, j’ai proposé à Mathias de répondre à quelques questions afin d’en apprendre un peu plus sur Passager 120.

Comment est né ce journal et pourquoi avoir choisi ce titre Passager 120?

Ce journal papier est né de la nécessité d’écrire, d’exprimer, de retrouver notre humanité au travers de ce qui fait sens dans la modernité actuelle qui inversement, œuvre à nous déshumaniser. Internet pose des problèmes aujourd’hui car la profusion de contenus multimédias finit par nous noyer, aussi il devient difficile de saisir des repères. Avec ce journal, il est question de revenir tranquillement à l’essentiel, s’éloigner du bruit, de la quantité, des écrans et de la consommation d’énergie qui fait fonctionner ce monstre technique.
Pourquoi ce nom de « Passager 120″ ? Ne sommes nous pas tous des passagers sur cette planète, le temps d’une vie ? On oublie souvent que nous sommes juste de passage ici et qu’à ce titre nous devrions montrer plus d’attention à notre environnement que nous maltraitons pour nos désirs de consommation immédiats car d’autres passagers viennent après nous. Le numéro « 120 » possède des consonances symboliques qui me parlent ; et puis il signifie aussi que nous sommes marqués, numérotés où que nous allions. L’époque actuelle est celle du contrôle des identités et des voyageurs, et cela signe l’éloignement progressif de notre liberté sous couvert de « démocratie »

Passager 120 est un journal décroissant. En quelques mots, qu’est-ce que la décroissance et la simplicité volontaire? Existe-t-il une différence?

Voilà une question pleine d’à-propos car il se trouve que Passager 120 va glisser vers la simplicité volontaire plus que vers la décroissance. Oui il y a une différence et elle peut s’avérer importante. La simplicité volontaire est un acte de vie personnel qui est un choix conscient de réduction de notre consommation pour s’ajuster finalement à nos besoins tout en s’éloignant du superflu souvent motivé par nos désirs.
La décroissance est une orientation plus politique, elle engage donc une vision sociale et entend structurer une volonté commune pour changer la société.

Pour résumer, la simplicité volontaire est une radicalité immédiate et concrète appliquée à soi-même avant tout. La décroissance est à mon sens d’une radicalité plus sociale, elle possède une dimension politique avec tous les risques de dérives que pourrait signifier la gestion « du bien » pour tous.

La simplicité volontaire et la décroissance baignent ensemble dans cette affreuse contradiction qu’est de parvenir à vivre de fait, dans un monde capitaliste où la notion de « profit » finit par tout organiser. Mais sans ces deux notions resterait-il de l’espoir ?

Peux-tu nous présenter un peu plus en détail Passager 120 ? Quels sujets sont abordés ? Pourquoi une parution trimestrielle?

Sous le titre du journal Passager 120, il y a une petite phrase qui pourrait être une forme de définition : « Passager parmi les siens, dont l’écriture futile & nécessaire trace l’existence du temps présent. » Cela veut tout dire et rien à la fois, tout dépend de la personne qui lit et de ses attentes.
Les sujet abordés sont toujours porteurs de sens. C’est un peu comme un voyageur qui découvrirait le monde sous un œil singulier et commencerait à le décrire. De fait cela nous éclaire différemment sur un réel que nous acceptons alors qu’il devrait nous interroger. Que faisons nous ici ? Que devenons-nous dans ce monde qui file sans que nous nous demandions vers quoi il fonce de plus en plus vite ?
Nous abordons des sujets de simplicité volontaire concrets, avec des exemples de la vie courante comme : Comment réduire ses déchets ? Dans le prochain numéro nous parlerons d’une méthode de cuisson hyper économe et souvent méconnue « la marmite norvégienne ». Nous nous autorisons aussi à écrire sous forme de dialogues imaginés, de nouvelles ou d’essais. Tout est bon pour faire passer des idées, des valeurs, titiller et ouvrir nos consciences sur des terrains inattendus.
Le journal se définit « à la limite du trimestriel » avec humour. Cela signifie qu’une parution trimestrielle est recherchée mais peut se trouver avancée de quelques semaines ou repoussée en fonction des circonstances. Le numéro 2 de Passager 120 a été avancée de 15 jours par exemple. Ce journal paraît à son rythme et il fait 15 pages bien inspirées. Pour le moment la voilure trimestrielle est confortable alors nous la conservons pour écrire heureux. Il est toujours possible de commander ce n°2 formidable avant la parution du n°3 (http://passager120.chez.com).

Les textes, la mise en page et les photos du journal sont très soignés. J’ai beaucoup apprécié sa lecture. Pourtant la décroissance ou la simplicité volontaire font peur. La forme est-elle aussi importante que le fond pour faire passer ces idées?

C’est difficile de répondre là ! Cela peut sembler étrange mais il me faudrait des pages entières pour te répondre véritablement. Pour faire court, oui, il y a une cohérence entre le fond et la forme. Il y a une cohésion d’ensemble et le lecteur est porté dans un univers complet avec lequel il peut créer un lien fort et indicible à la fois. Ce lien c’est notre temps, notre histoire commune, le sens, la sensation profonde, la beauté, notre place sur Terre et notre responsabilité aussi. On en vient alors à la simplicité volontaire et à notre rapport aux éléments biologiques qui forment notre réalité, cette biosphère dans laquelle nous vivons tous et que nous avons le devoir de protéger en nous transformant, si nous voulons que nos enfants et nous-mêmes puissions y demeurer encore.
La simplicité volontaire fait peur ? Je te répondrai que non. Moi j’ai peur de ce monde actuel fou, qui consomme notre Terre en la détruisant comme jamais, j’ai peur de cette « nécessaire » croissance qui finit de détraquer le climat et fait monter les mers. C’est bien le monde actuel qui est effrayant, ce monde fait d’argent virtuel, ce néant politique du profit qui autorise à pulvériser du glyphosate impunément sur toute la France agricole et il faut bien un journal pour raconter cette histoire qui nous touche tous et pour laquelle nos consciences se détournent, absorbées qu’elles sont dans les écrans en tous genres et par l’activisme économique frénétique.
Seule une nouvelle culture commune et un monde véritablement conscientisé peut nous sortir de cette impasse. Passager 120 s’écrit sur ce chemin là.

Passager 120 n’est disponible qu’en version papier, imprimé à la demande et dans le respect de l’environnement (encres à l’eau, envoi sans blister, objectif d’un bilan carbone négatif …). Pourquoi ce choix?

C’est un choix volontaire. Se retirer progressivement d’internet et de son flux incessant qui consomme tant d’énergie m’a semblé important. Ainsi Passager 120 est imprimé au numéro uniquement sur abonnement, il n’y pas de perte en papier et pas de pilon.
Un journal permet une concentration longue propice à une conscience plus profonde, à une attention pleine.
Sur internet l’esprit devient flux, il est instable, insatiable et saute de page en page, nous y avons pris de mauvaises habitudes.

Lorsqu’on ouvre Passager 120, les écrans sont éteints et c’est bien. Si la chance nous sourit et que le soleil est là, nous pouvons sortir lire dehors, dans un transat, sur un banc, en phase avec un lieu qu’on aime. Plus besoin de piles ou d’écrans qui nous électrisent la rétine. Posons nous sur le papier à la lumière du jour. Nous sommes les passagers d’un temps de l’esprit retrouvé, plus lent et plus tranquille. Voilà, on est bien là !

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A découvrir dans le numéro 2 de Passager 120 : la nouvelle « Imagine un matin sans électricité »

Vous pouvez vous abonner à Passager 120 à l’adresse suivante : http://passager120.chez.com/

La vitrine numérique de Passager 120 c’est par ici et la page Diaspora*, librement accessible, c’est par .

Connaissez-vous la simplicité volontaire ou le journal Passager 120?

Que pensez-vous du mode d’impression et de distribution de Passager 120 (impression au numéro, envoi direct sans film plastique) ?

2 réflexions sur « [Découverte] Passager 120, le journal de la simplicité volontaire »

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Si tu veux je peux te prêter mon exemplaire pour te faire idée.

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