Comment le cancer a modifié mon rapport au temps?

En novembre 2016, les médecins m’ont diagnostiqué un cancer de la thyroïde. Ce grand bouleversement dans ma vie a modifié mon rapport au temps. Je n’avais plus envie de courir toute la semaine. Je n’avais plus envie de m’épuiser dans des activités qui ne me permettaient pas de m’épanouir. J’avais simplement une grande envie de vivre.

Pendant toute la période de soins, mon corps conditionnait le nombre et la vitesse de mes occupations et de mes mouvements. J’ai eu le sentiment que le temps ne passait pas à la même vitesse. Il était très rapide quand j’enchaînais les consultations médicales et très lent pendant et après mes séjours à l’hôpital. Dans les deux cas, je ne maîtrisais plus mon temps. J’ai ainsi pris conscience que je devais lâcher prise sur un certain nombre d’obligations et de barrières que je m’étais imposées. Je ne pouvais pas tout faire. Le rythme que la société, mon entourage ou que je m’imposais n’était plus le mien. Mon rapport au temps avait changé et j’avais besoin d’apporter de la qualité à mon temps.

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Avant 1914, nos aïeux disposaient de 500 000 heures de vie : 200 000 heures à dormir, 200 000 heures à travailler et 100 000 heures de temps libre. Aujourd’hui, nous vivons 700 000 heures et sur ces 700 000 heures, nous dormons (environ) toujours 200 000 heures. Nous consacrons 100 000 heures au travail et aux études. Il nous reste 400 000 heures de temps libre soit 4 fois plus qu’il y a un siècle. Pourquoi avons-nous toujours cette sensation de manquer de temps? Paradoxal à une époque où nous n’en avons jamais eu autant¹.

Pour la plupart d’entre nous, nous avons des contraintes liées à nos horaires de travail, à nos déplacements, à nos diverses obligations… Mais il nous reste encore énormément de temps libre que nous pouvons choisir de passer à des activités qui nous font du bien, des activités épanouissantes avec nos proches ou tout simplement prendre du temps pour soi. Si personnellement, il m’a fallu une grave maladie pour réaliser que je gaspillais mon temps dans des occupations qui n’étaient pas toutes aussi enrichissantes que je le souhaitais, je vous encourage à réfléchir à comment organiser vos journées et vos semaines, à déterminer vos limites et vos contraintes et à lister vos envies et vos souhaits pour donner de la valeur à votre temps. Cependant cette réflexion est personnelle et doit refléter vos désirs et vos besoins.

Après plus d’un an d’observations, j’ai tiré plusieurs enseignements et j’ai commencé à mettre en place dans mon quotidien de nouvelles habitudes. J’ai fait la liste de ce que je vous lais et ce que je ne voulais plus.

  • Je suis une personne plutôt du matin qui, dans l’idéal, a besoin de 9 heures de sommeil par nuit. J’essaie de me lever chaque jour à la même heure, week-end compris pour installer une routine et éviter la fatigue.

Question à vous poser : Êtes-vous du soir ou du matin? Inutile de tenter le Miracle Morning si vous êtes du soir.

  • Puisque j’ai besoin de beaucoup de sommeil, je suis incapable de regarder la télévision après 22 heures. La solution que j’ai trouvé est d’une part de beaucoup moins regarder la télévision (1 à 2 soirs par semaine) et de privilégier les DVDs (emprunté à la bibliothèque) et le replay (certes pas très écologique). Je maîtrise ainsi l’horaire du début du programme.

Question à vous poser : Pourquoi regarder vous la télévision? Par habitude, par convention sociale, par peur de ne pas être informé·e? Cela peut être l’occasion d’expliquer à vos proches que vous ne regardez pas telle émission parce qu’elle ne vous apporte aucun plaisir.

  • J’ai également déterminé les activités et occupations qui m’enrichissent : des activités physiques comme le yoga, la marche, le vélo, le jardinage et des activités plus calmes comme l’écriture d’articles sur le blog, la lecture ou la photographie. Si je me fixe des créneaux spécifiques pour un cours collectif de yoga par semaine ou jardiner dans mon potager, j’intègre certaines activités à des tâches quotidiennes. Par exemple, je vais faire mes courses à vélo ou je prévois une sortie photo pour écrire un article spécifique (photo + marche + blogging).

Question à vous poser : Combien et quelles types d’activités avez-vous envie de pratiquer? Avez-vous envie de vous investir dans une ou plusieurs associations? Combien de temps libre avez-vous de disponible? Ces activités sont-elles régulières ou ponctuelles? L’erreur à ne pas commettre est de multiplier les activités pour remplir votre emploi du temps. Mieux vaut une activité de deux heures par semaine pendant laquelle vous prenez soin de vous et vous recharger vos batteries que perdre son temps dans une multitude d’activités qui ne vous apporte aucun plaisir.

  • Quand nous pensons notre rapport au temps, il est difficile de faire l’impasse sur les réseaux sociaux, ces empoisonneurs de temps. Si je n’avais pas de blog, je ne serai pas sur les réseaux sociaux. Le temps de l’immédiateté de ces réseaux n’est absolument pas le mien. J’ai énormément de mal à absorber et à analyser toutes les informations qui arrivent à mon cerveau. J’ai donc décidé de suivre moins de personnes même si leur contenu est pertinent. Je préfère trouver d’autres canaux d’informations plus adapté à mon rythme.

Question à vous poser : Que recherchez -vous sur les réseaux sociaux? Combien de temps par jour êtes-vous connecté·e? Quelles émotions ressentez-vous après la lecture d’un commentaire (positif ou négatif)? A vous de déterminer si vous avez besoin de fermer un ou plusieurs comptes, de limiter le nombre de personnes que vous suivez ou de définir des périodes de déconnexion ou de fixer un temps où vous êtes présents sur ces réseaux.

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J’ai résumé quelques pistes de réflexions qui me paraissent importantes pour moi à cet instant. Cette liste n’est pas exhaustive. A vous de vous en emparer, de l’enrichir en fonction de vos besoins. Cet exercice créé par Natasha peut vous y aider à analyser votre emploi du temps.

Avant de conclure cet article, j’aimerais revenir sur deux choses qui sont importantes pour moi. Mon temps est très précieux et je l’ai compris quand j’ai failli ne plus en avoir. Cela veut dire qu’il faut apprendre à dire non aux sollicitations externes de la société moderne quand elles vous empoisonnent (réseaux sociaux, surconsommation…) mais parfois aussi à des projets qui vous tiennent à cœur. Ce n’est pas un exercice facile que de refuser une proposition qui correspond à vos valeurs mais qu’à ce moment précis de votre vie, il vous faudrait sacrifier ce temps si précieux. Je préfère dire non, expliquer que ce projet est intéressant mais que je ne pourrais pas y accorder autant de temps que je le souhaite et que ce ne sera pas une expérience bénéfique pour les deux parties.

Mon rythme de vie est également différent suivant les périodes et les saisons. Je peux avoir des semaines et des week-ends très chargés et le mois suivant sera par exemple beaucoup plus calme. Dans tous les cas, j’essaie d’accorder de la valeur, de l’importance et de la qualité à mon temps même si parfois j’ai l’impression que mon temps s’accélère. Et je me rappelle que je peux dire non à de nouvelles demandes.

Aujourd’hui, je vais bien. Mon cancer est guéri. J’ai quand même une surveillance pendant quelques années. Même si cette expérience a été dure, elle fut néanmoins enrichissante car elle a profondément et durablement modifié mon rapport au temps. J’ai compris qu’il était important de prendre soin de soi pour mon bien-être mais également pour les autres

Avez-vous modifié votre rapport au temps? Pensez-vous qu’il est important de modifier votre rapport au temps?

Cet article a été écrit dans le cadre de l’éco-défi « Gérer son temps de manière durable » organisée par Natasha, créatrice et rédactrice du blog Echos Verts.

Retrouvez tous mes articles en lien avec cet éco-défi :

¹ Chiffres issus de la chronique d’Eric Fottorino dans l’émission Grand bien vous fasse de France Inter du 18 janvier 2018. Chronique à écouter à partir de 48’30 ».

12 réflexions sur « Comment le cancer a modifié mon rapport au temps? »

  1. Changeons notre vie

    Bel article qui remet les pendules à l’heure.Il est effectivement bien triste de constater que la majorité des gens courent après le temps, ils n’ont pas le temps de vivre « leur vie ». Souvent, comme tu le dis,il faut un électrochoc, genre maladie grave, ou autre pépin pour que l’on prenne conscience de cela.
    J’ai moi même fait partie de ceux là, et suite à quelques drames (maladies et décès de mes proches), j’ai changè ma manière d’appréhender la vie. Je pousse les membres de ma famille et mes amis (et aussi sur mon blog) à faire de même, car je suis convaincue qu’ils y trouveront le « bonheur »..
    Et comme tu le dis si bien « donnons de la valeur à notre temps ».
    Belle journée à toi 🙂

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Il est triste de constater qu’il faut un gros choc dans sa vie pour penser à commencer à profiter de sa vie. A notre époque moderne, c’est difficile de ne pas courir tout le temps car il y a beaucoup de sollicitations.
      J’espère que mon article fera réfléchir quelques personnes.
      Merci et belle journée à toi.
      Ici il neige et je vais en profiter 🙂

  2. latablevegederese

    outch !! bravo et merci de partager des moments aussi difficiles avec tout le monde ♥
    je suis un peu hors course sur tou tça ! je ne travaille plus, je suis effectivement du matin et oui! nous nous levons d’assez bonen heure TOUS les jours, ne serait-ce que pour aller marcher le matin de préférence !!
    les réseaux sociaux, me servent uniquement à avoir en direct des nouvelles de mes copines ! on aime bien (certainement question de génération là aussi ) et tout ce qui se trame autour ben … on s’en fout un peu royal !
    j’ai une page pour mon blog et pour ma chambre d’hôte et bien sûr mon groupe♥
    et depuis mes 50 ans, j’ai appris à dire non !! une grande révolution ! pour la famille, l’entourage proche, le travail ! un vrai tremeblement deterre mais depuis …. ouf ! je vis !!
    bien mieux quitte à passer pour une égoîste => je m’en fiche !!!
    des bisous plein ♥

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      En réalité, écrire cet article a été moins difficile que je ne le croyais et je pense que cela m’a fait du bien.
      Je pense que chacun doit trouver son rythme, que l’on soit du soir ou du matin. Pour les réseaux sociaux, il faut savoir les maîtriser et ne pas se laisser griser.
      Mon cancer m’a permis aussi de lâcher sur un grand nombre de choses, de penser plus à moi, d’apprendre à dire non même si ce n’est pas facile au début. Je crois qu’avec l’âge cela devient moins difficile aussi.
      Bisous et merci.

  3. Céline

    Bonjour Catherine et merci pour ce témoignage personnel et cette réflexion qui en découle… Je souhaite que ta santé continue de bien aller.
    En ce qui me concerne, c’est la notion de « prendre du temps pour moi sans culpabiliser » que j’essaie de travailler… parfois, on préfère éviter d' »arrêter la machine » pour ne pas être confrontée à une réalité ou des malaises qui remontent à la surface… gérer mon temps libre de façon positive n’est pas toujours évidente mais bon, ceci est un autre sujet « sensible ».
    Bonne journée ! 😉

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Bonjour Céline,
      Je te comprends. C’est dur de ne pas culpabiliser. C’est un travail sur le long terme. Mais ce n’est pas évident tout de même. J’espère que tu trouveras des solutions qui te conviennent.
      Bonne journée

  4. kellyac

    Merci pour ton témoignage trés touchant, on oublie souvent que la vie ne tiend finalement qu’à un fil. Je me pose déjà régulièrement les questions que tu proposes, mais un rappel ne fait pas de mal, surtout que j’ai toujours du mal À aprécier mon temps à sa juste valeur: ou bien ca va trop vite pour moi, ou j’ai une sensation de ne pas en faire assez… dur de trouver un équilibre qui fonctionne bien!

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Merci pour ton soutien.
      Je crois que trouver un équilibre est le plus difficile. En plus notre rythme de vie varie selon les saisons et l’âge de la vie. J’espère que tu trouveras ton équilibre.

  5. La Nébuleuse

    Ton témoignage et poignant et vraiment intéressant… J’ai un rapport un peu double au temps, j’aime à la fois le temps long, prendre son temps, ne pas se mettre trop de tâche… du moins sur le principe, et finalement je suis plus efficace quand j’ai des listes de choses à faire (car je procrastine beaucoup). La thématique lancée par Natasha sur la gestion du temps m’a forcément beaucoup intéressée, notamment en ce qui concerne les réseaux sociaux

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Quand j’étais étudiante, je faisais presque tout à la dernière minute. Ce stress me galvanisait. Si maintenant je fais moins de choses à la dernière minute, il m’arrive encore de repousser certaines tâches mais j’essaie de ne plus les faire dans l’urgence.
      J’ai aussi besoin de listes pour me cadrer autrement mes réflexions s’éparpillent et je ne fais pas grand chose. As-tu essayé la méthode Pomodoro ou celle qui consiste à commencer ta journée pour les tâches « ennuyeuses » et finir par les tâches qui te plaisent?

  6. La bulle de C6

    Merci pour cet article qui fait si bien écho en moi. Le cancer de la thyroïde a été une fausse alerte pour moi mais cela m’a fait bien réfléchir et j’ai tiré des conclusions proches de celles exposées dans cet article. J’ai redéfini mes priorités, mes envies personnelles, mes choix de vie et j’ai appris le lâcher prise. Je suis plus en phase avec moi-même.

    1. Catherine [la marmotte chuchote] Auteur de l’article

      Les grands bouleversements de la vie nous permettent de réfléchir sur nous-mêmes et parfois ce changer profondément. Je suis heureuse que ton cancer n’était qu’une fausse alerte et qu’il t’a permis de te recentrer sur toi et ce que tu désires faire dans ta vie.

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