Bienvenue dans le monde des logiciels libres

Je me rappelle très bien ce jour de juin 2002, à 48 heures de rendre mon mémoire de stage de maîtrise. J’ai découvert de jolies croix rouges à la place de tous mes graphiques. Devant cette apparition, plusieurs émotions se sont succédées dans ma tête : l’incrédulité (ces satanées croix sont toujours là quand je rouvre mon document), l’affolement (je dois remettre tous mes graphiques à 2 jours de la deadline), la colère (p….. d’ordinateur de m….), le sarcasme de mon directeur de stage (« Ah oui! Mais çà arrive à tous le monde. Faut passer par là! ») … Je vous rassure, l’histoire se termine bien. J’ai remis mes graphiques sur mon document et la fin du stage s’est très bien passée. Mais aujourd’hui encore, je ne sais pas ce que j’ai fait pour que le logiciel « comprenne » : mettre des croix rouges à la place de mes jolis graphiques.

3 mois plus tard, j’ai intégré un DEA (çà s’appelait comme çà à l’époque) avec toujours l’histoire de ces petites croix rouges dans la tête. Un matin, mon nouveau directeur de stage me demande : « Tu ne voudrais pas essayer un nouveau système d’exploitation? ». Pourquoi pas? Cà ne peut pas être pire que Windows, l’OS que tout le monde utilise et qui m’a fait tellement de malheurs. Voilà comment j’ai découvert Linux (plus précisément Ubuntu) et le monde du logiciel libre, un peu par hasard mais toujours fidèle depuis 13 ans. J’avoue : tout n’a pas été simple. Il y a eu des hauts et des bas mais j’ai été bien encadré et tout s’est relativement bien passé.

Informatique et écologie

Que vient faire un post sur l’informatique dans un blog d’écologie? Ces deux thèmes ne sont pourtant pas si éloignés. L’informatique est un secteur qui consomment énormément d’énergie et génère une grande quantité de déchets électroniques. Le site Green IT nous apprend que l’empreinte écologique du web serait de « 200 kg de gaz à effet de serre et de 3 000 litres d’eau par internaute et par an. » Selon un chiffre cité dans un rapport de l’Ademe en 2012, 13,5% de la consommation électrique en France serait imputable au secteur des nouvelles technologies. Ce même secteur contribuerait à 5% des émissions des gaz à effet de serre. Les data centers sont souvent accusés d’être des grands consommateurs d’électricité mais beaucoup d’effort ont été fait de leur part ces dernières années. Selon le dernier rapport de Greenpeace Clicking Green de 2015 (pour la version 2017 c’est ici), l’entreprise Apple alimenterait tous ses data centers avec de l’énergie renouvelable en 2015. Si les data centers deviennent plus efficients, leur consommation électrique ne cesse de croître et pourrait atteindre 21% de la consommation électrique mondiale en 2017. L’autre problème de l’informatique, ce sont les déchets électroniques. Combien d’ordinateurs, de téléphones portables, de tablettes avez-vous eu ou jetés parce qu’ :

  • ils étaient cassés et non réparables,
  • ils étaient devenus trop lents,
  • ils étaient devenus trop vieux,
  • ils n’étaient plus à la mode.

Nos poubelles déborderont bientôt de e-déchets. En 2010, un habitant de la planète générait 5 kg de déchets électroniques. Quatre ans plus tard, on est passé à 6 kg/hab. Ce chiffre ne cesse de croître. A ce petit jeu, les Européens sont très mauvais (15,6 kg/hab contre 12,2 kg/hab pour les Américains (Amérique du Nord, Sud et Centrale)). Les cartes informatiques regorgent de métaux précieux et/ou dangereux (or, argent, palladium, cuivre, aluminium mais aussi mercure, cadmium, plomb). Nos vieux ordinateurs sont souvent envoyés dans les pays en voie de développement (Afrique, Asie) pour être recyclés, dans des conditions sanitaires déplorables. 60 à 90% des déchets électroniques échapperaient ainsi aux filières de recyclage. Peut-on faire autrement ? Et si l’avenir était aux logiciels libres?

Quantité de e-déchets (en kg/hab) générée par pays en 2014. (Données issues du rapport de l'ONU The Global E-Waste Monitor)

Quantité de e-déchets (enkg/hab) générée par pays en 2014.Données issues du rapport de l’ONU The Global E-Waste Monitor

Les logiciels libres

Vous avez peut-être déjà utilisé un logiciel libre, tel Firefox, sans le savoir. Un logiciel libre respecte, en tant qu’utilisateur, votre liberté dans plusieurs domaines. Ainsi, un logiciel libre garantit 4 libertés fondamentales :

  • la liberté d’utilisation,
  • la liberté d’accès au code source,
  • la liberté de modification du code source,
  • la liberté de distribution.

Contrairement aux systèmes des entreprises Microsoft ou Apple par exemple, vous pouvez accéder, modifier le code source si vous le souhaitez (à condition de s’y connaître en informatique). Attention aux confusions possibles : logiciel libre ne veut pas dire gratuit et un logiciel (libre ou pas) est soumis au droit d’auteur (il existe d’ailleurs différents types de licences associés au logiciel libre). Les logiciels libres permettent de partager les savoirs, rester maître de son informatique et adapter son ordinateur à ses besoins. Parmi les logiciels libres, vous pouvez trouver des systèmes d’exploitation (GNU/Linux) mais aussi des suites bureautiques (LibreOffice). J’ai choisi de travailler avec la distribution Ubuntu pour plusieurs raisons : c’est un système fiable, léger (les logiciels se lancent rapidement), gratuit mais aussi assez ergonomique depuis son lancement en 2004. Pourquoi choisir un système d’exploitation libre plutôt que propriétaire? Dans le monde du libre et c’est un gros avantage, il est possible de modifier, améliorer vos logiciels si jamais vous avez un problème technique. Il y a aussi beaucoup d’autres avantages très bien résumés dans le billet de David Larousserie sur son blog A la source.

Certes, çà marche (très bien d’ailleurs), c’est gratuit et légal (qui n’a jamais piraté un logiciel?) mais sur les ordinateurs personnels, les distributions Linux sont ultra-minoritaires. Seulement 2% des ordinateurs personnels utilisent Linux. Pourtant la majorité des serveurs qui hébergent les sites internet (dont ce blog) opèrent sous Linux. Le système Android pour les smartphones est aussi basé sur Linux.

Répartition des systèmes d'exploitation dans les ordinateurs personnels, Avril 2015. Source : http://www.netmarketshare.com/

Répartition des systèmes d’exploitation dans les ordinateurs personnels, Avril 2015. Source : http://www.netmarketshare.com/

En tant qu’utilisatrice de Linux, je dois m’adapter dans un monde dominé par Windows. Quand j’ouvre un fichier Word, la mise en page est parfois rocambolesque. Mais j’ai toujours pu ouvrir les fichiers quelque soit leur format. Travailler avec des outils peu répandus a parfois des inconvénients. Je ne suis pas informaticienne mais j’ai la chance d’avoir à la maison, Mr Marmotte, qui lui s’y connaît pas mal en informatique. J’avoue c’est une aide précieuse. Mais en 10 ans j’ai appris à me défendre et à m’intéresser un peu plus à mon ordinateur. Ce n’est plus une boite noire. Je suis maintenant plus active que passive. Je n’hésite plus à chercher sur internet, à l’aide de tutoriaux, les solutions à mes petits problèmes. Je peux tester plusieurs types de logiciels avant de choisir celui que je préfère. Le logiciel libre est encore confidentiel et gagne à se démocratiser. Cependant, beaucoup de progrès au niveau ergonomique ont été faits depuis mes débuts sous Ubuntu Linux. Ce type de logiciel peut aussi être très utile dans le domaine de l’économie sociale et solidaire.

L’exemple de Emmabuntüs

Les logiciels libres peuvent-ils aider à diminuer les déchets électroniques? De nombreux ordinateurs sont jetés ou donnés, notamment à Emmaüs, alors qu’ils sont encore fonctionnels mais un peu trop vieux pour faire tourner les dernières versions de Windows. La distribution Emmabuntüs a été mise au point  pour remettre sur le marché ces ordinateurs. Ils comportent une suite bureautique, un navigateur internet, tous les outils pour les photos, les vidéos, l’audio, des jeux. Ces ordinateurs peuvent avoir une deuxième vie et ce ne sont surtout pas des ordinateurs au rabais. Après le reconditionnement, les ordinateurs sont revendus. Ce type d’action permet de lutter contre les e-dechets mais aussi sur l’obsolescence programmée. Personnellement, nous possédons un ordinateur portable de 10 ans d’âge. Devenu un peu trop lent à notre goût avec la dernière version de Ubuntu, Mr Marmotte a installé la version Lubuntu (L pour Light). Cette version est plus légère, plus économe. Notre ordinateur a retrouvé sa jeunesse. Nous n’avons pas eu besoin de racheter un ordinateur.

Découvrez quelques logiciels libres

Pour découvrir les logiciels libres, vous n’êtes pas obligé de changer de système d’exploitation. Pour information, Il est possible d’avoir un système Linux et un système Windows sur le même ordinateur. Comme logiciel, il existe :

Framasoft a également développé des alternatives libres accessibles online. Découvrez l’édition collaborative en ligne grâce à Framapad, un tableur collaboratif grâce à Framacalc et beaucoup d’autres alternatives sont disponibles ici. Pour finir, découvrez le réseau social Diaspora/Framasphère.

Connaissez-vous les logiciels libres?

Toutes les infos du blog La marmotte chuchote sur Diaspora/Framasphère.

A lire : Logiciel libre et ESS, une économie à l’intention de tous, L’humanité 03/02/2015

Sources : Framasoft, GreenIT, Ademe, Greenpeace, Journal de l’environnement

5 réflexions sur « Bienvenue dans le monde des logiciels libres »

  1. GreenerDaddy

    bonjour
    On a eu le même effet en passant de PC sous Windows à Mac, plus cher mais qui dure plus longtemps… Prochaine étape une distribution Linux ? Je ne sais pas ^^
    Pour la suite Office, nous utilisons OpenOffice qui marche très bien aussi. Dans tous les cas, l’usage qu’on en fait conditionne pas mal l’appareil dont on a réellement besoin.
    A l’heure du dématérialisé, on préserve les forets en évitant d’imprimer nos factures, mais le bilan est il positif avec la contre-partie des GES produits par les datacenter ? Le débat est lancé 😉

    1. la marmotte chuchote Auteur de l’article

      Je connais très peu le monde de Apple mais pour moi, çà reste un logiciel propriétaire )-:. Ce qui me gène beaucoup chez Apple, c’est le phénomène de mode.
      LibreOffice est un dérivé de OpenOffice. Les deux suites bureautiques sont très proches.
      Facture papier ou facture numérique, laquelle a le moins d’impact? Je n’ai pas la réponse mais il serait intéressant de regarder. Mais la prochaine révolution sera l’internet des objets, qui posera certainement le même genre de questions.

  2. Guenolet

    A propos des datas centres, j’avais vu un reportage qui montrait que Facebook en avait installé un au nord de la Suède, pour un refroidissement idéal. L’endroit était quasi déserte par la population, et avec cette implantation, de nombreux étudiants sont venus. De même à Strasbourg, une entreprise qui gère des serveurs ( j’ai oublié son nom) refroidit les systèmes, qui sont installés au port du Rhin, ainsi les serveurs sont très économes.

      1. la marmotte chuchote Auteur de l’article

        Beaucoup d’efforts sont faits par les entreprises pour minimiser l’impact environnemental de leurs data centers. Je crois que Google a aussi installé une partie de ses serveurs dans un pays nordique.

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